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Prince du Fleuve Congo
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21 juin 2006

Article dans Libération: Fièvre xénophobe au Congo-Kinshasa

La «congolité» des candidats empoisonne la campagne pour les élections du 30 juillet.

Par Christophe AYAD
mercredi 21 juin 2006

Après l'ivoirité, la congolité. Attendues depuis plus de quarante ans, les premières élections libres de l'histoire du Congo-Kinshasa, prévues le 30 juillet, ont libéré les démons xénophobes couvant dans un pays meurtri par plus de trois décennies de «kleptocratie» du maréchal Mobutu, suivies de deux guerres qui ont causé, directement ou indirectement, 4 millions de morts en dix ans. Vrais-faux complots, intimidations, procès, arrestations, diffamation, émeutes, la campagne se déroule dans un climat délétère. A tel point que les ambassadeurs du Conseil de sécurité de l'ONU, en visite à Kinshasa, ont effectué une mise en garde. «Les discours sur la "congolité" peuvent être très dangereux», a estimé l'ambassadeur français Jean-Marc de La Sablière, qui a appelé à un «apaisement».

Transition. Si la campagne a pris un tour aussi tendu, c'est que les conditions d'un scrutin transparent et serein sont loin d'être réunies. L'est du pays est sillonné par des bandes armées qui ont essaimé à la faveur de la guerre et les 18 000 Casques bleus de la Monuc ne suffisent pas à contrôler un territoire grand comme l'Europe : En Ituri, sept Casques bleus népalais sont retenus en otages depuis le 28 mai par des miliciens. Pour les élections, l'Union européenne va déployer une force, l'Eufor-RDC, principalement constituée de soldats allemands et français, en appui des Casques bleus (lire ci-dessous). Les trois années de transition, au cours desquelles la plupart des anciennes factions ont siégé au gouvernement, n'ont pas restauré l'Etat. Le Congo n'a ni armée nationale digne de ce nom, ni police, ni justice, ni administration. Le recensement électoral a été mené au pas de charge et un nouveau report des élections est inconcevable. Mais, comme l'a souligné l'ambassadeur français à l'ONU, «les élections ne sont qu'une étape. Il est important que les Congolais continuent à mettre la maison en ordre. Il y a des pratiques qui doivent changer». Une allusion à la corruption endémique qui a ruiné un pays où l'ONU dépense 1 million de dollars par jour.

La principale hypothèque pesant sur le scrutin est le boycott d'Etienne Tshisekedi, 73 ans, chef de l'UDPS et opposant historique de Mobutu. Jouissant d'une réelle popularité, notamment dans son fief du Kasaï, il est resté sourd aux appels de la communauté internationale, estimant ne pas avoir reçu de garanties suffisantes sur la «transparence» des élections. Ses détracteurs l'accusent d'avoir peur d'une défaite dans les urnes. Lui menace de faire descendre ses partisans dans la rue à partir du 30 juin.

Origines tutsies. Faute d'adversaire d'envergure, le jeune président Joseph Kabila, 35 ans, qui avait hérité du pouvoir après l'assassinat de son père, en janvier 2001, pourrait l'emporter dès le premier tour. Sa candidature «indépendante» bénéficie du soutien de son parti, le PPRD, et d'une quinzaine d'autres formations. Son statut de favori et de «chouchou» de la communauté internationale a provoqué une dérive dangereuse de la campagne, qui ne tourne qu'autour de ses supposées origines tutsies. Ce débat sur l'identité de Joseph Kabila, qui a conçu son mariage, ce week-end à la cathédrale de Kinshasa, comme une opération politique, empoisonne peu à peu tout le pays. Aux discours haineux dans les médias répondent arrestations arbitraires de journalistes et de militants des droits de l'homme. L'ambiance est si tendue que l'Association des radios communautaires et associatives du Congo a appelé à une «journée radio silence» pour exiger la sécurisation des journalistes durant le processus électoral. Plus grave encore, dans le Kivu, à l'est du pays, où la «question rwandaise» reste ultrasensible, la propagande pourrait déclencher de nouveaux massacres.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=391915

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